Ombre
Lichtenberg joue au bilboquet avec son ombre.
Lichtenberg joue au bilboquet avec la liberté de son ombre. Lichtenberg joue au bilboquet avec le sourire de son ombre. Lichtenberg joue au bilboquet avec le sourire de liberté de son ombre.
Lichtenberg joue au bilboquet avec la bibliothèque de son ombre. Lichtenberg joue au bilboquet avec son cœur. Lichtenberg joue au bilboquet avec la bibliothèque d’ombre de son cœur.
Lichtenberg joue au bilboquet avec le jugement de son cœur. Lichtenberg utilise une potence pour jouer au bilboquet avec son ombre, avec la bibliothèque de son ombre, avec la bibliothèque d’ombre de son cœur.
Lichtenberg joue à cache-cache avec la lumière de son ombre. Lichtenberg joue à cache-cache avec l’électricité de son ombre. Lichtenberg joue à cache-cache avec l’ange électrique de son ombre.
Lichtenberg cherche à toucher la lumière de son ombre. Lichtenberg cherche à embrasser la lumière de son ombre. Lichtenberg cherche à embrasser l’électricité de son ombre. Lichtenberg cherche à embrasser l’ange électrique de son ombre.
Lichtenberg tamise le feu avec son ombre. Lichtenberg tamise le feu de son âme avec les acrobaties de son ombre. Lichtenberg tamise le feu de son âme avec la civilité de son ombre, avec les acrobaties de civilité de son ombre.
Lichtenberg tamise le feu de son âme avec le sourire de son ombre. Lichtenberg tamise le feu de son âme avec les acrobaties de sourires de son ombre.
Lichtenberg tamise le feu de son âme avec les révérences de son ombre, avec les révérences de handicap de son ombre.
Lichtenberg tamise le feu de son âme avec les rêves de son ombre. Lichtenberg tamise le feu de son âme avec les révérences de rêves de son ombre, avec les rêves de civilité de son ombre.
Lichtenberg utilise son ombre comme microscope. Lichtenberg joue au bilboquet avec le microscope de son ombre.
Lichtenberg immisce la chance de son ombre entre la liberté et l’éblouissement, entre la liberté de sa raison et l’éblouissement de son sentiment, entre la liberté de son sentiment et l’éblouissement de sa raison.
Lichtenberg écrit comme l’anatomiste de son ombre.
Lichtenberg dissèque l’anatomie de son ombre. Lichtenberg dissèque l’anatomie de son ombre avec des aiguilles d’horloges.
Lichtenberg dissèque son ombre avec de la poudre à canon.
Lichtenberg brode l’auréole de son ombre avec des miettes de pain. Lichtenberg compose des feux d’artifice avec des miettes de pain. Lichtenberg brode l’auréole de son ombre avec un feu d’artifice de miettes de pain.
Lichtenberg médite les aléas de son ombre au petit bonheur du grand jamais.
Lichtenberg joue avec les éclairs de son ombre. La subtilité absurde de Lichtenberg badine avec les éclairs de son ombre.
Lichtenberg porte son ombre autour du doigt comme un bijou.
Lichtenberg porte son ombre autour de l’index comme une bague de fiançailles.
Lichtenberg bénit son ombre avec sa raison. Lichtenberg bénit son ombre avec des équations mathématiques. Lichtenberg bénit son ombre avec des équations mathématiques d’éternuements.
Lichtenberg utilise les cadrans solaires comme cibles de son ombre. Lichtenberg utilise son ombre comme prisme de sa pensée.
Lichtenberg aimante la ligne d’horizon avec l’électrocution de son ombre. Lichtenberg aimante le fil de rasoir de l’horizon avec l’électrocution tête-bêche de son ombre.
Lichtenberg utilise son ombre comme une ombrelle. Lichtenberg utilise son ombre comme ombrelle et parfois aussi comme un paravent.
Lichtenberg utilise les tapis-volants comme paillassons de son ombre.
Lichtenberg chevauche les éperons de son ombre. Lichtenberg chevauche les éperons de son ombre avec les rêves même de la raison.
Lichtenberg charme les serpents de son ombre. Lichtenberg charme les serpents de la superstition. La raison de Lichtenberg charme les serpents de superstition de son ombre.
Lichtenberg lime le feu d’artifice de son ombre.
Lichtenberg télégraphie les feux d’artifice de son ombre.
Lichtenberg utilise son sexe comme baromètre de son ombre.
Lichtenberg immisce les intuitions de son ombre entre sa pensée et sa parole.
Lichtenberg élabore des tourbillons d’allumettes. Lichtenberg élabore des tourbillons d’allumettes avec le sourire de son ombre.
Lichtenberg démange les allumettes de son ombre. Lichtenberg démange des allumettes avec le lynchage de son ombre. Lichtenberg démange des sourires d’allumettes avec le lynchage de son ombre. Lichtenberg démange des lynchages d’allumettes avec le sourire de son ombre.
Lichtenberg magnétise ses phrases avec la gravitation de son ombre. Lichtenberg magnétise l’éclair de ses phrases avec la gravitation de son ombre. Lichtenberg magnétise l’ombre de ses phrases avec la gravitation de l’éclair, avec l’éclair de la gravitation. Lichtenberg magnétise la gravitation de ses phrases avec l’éclair de son ombre.
« Peu d’hommes donnent l’impression d’avoir de l’esprit quand ils regardent le soleil. »
C’est pourquoi Lichtenberg essaie plutôt d’avoir de l’esprit à l‘instant où il apparait regardé par son ombre.
« Je ne veux point te faire de l’ombre, petite bête, le soleil t’appartient autant qu’à moi. (c’était une petite araignée). »
Le tact de Lichtenberg est d’évoluer à l’intérieur de l’espace de telle manière qu’il parvienne à ne projeter son ombre sur aucun être vivant et même sur aucune chose. Le tact de Lichtenberg est de tenter de projeter son ombre non pas à la surface de la terre plutôt à l’intérieur du vide, plutôt à l’intérieur du vide de l’espace.
Lichtenberg pense de telle manière qu’il projette son ombre à la verticale du sol. Lichtenberg pense de telle manière qu’il projette son ombre à l’intérieur du vide de la gravitation, à l’intérieur du vide d’espace de la gravitation.
Marche
« Pourquoi tout est-il attiré vers le sol ? La force qui en est la cause (…) est si indispensable à notre bonheur temporel que celle qui nous fait penser à notre bonheur spirituel. »
Lichtenberg sait qu’il existe un bonheur de la gravitation, un bonheur miraculeux de la gravitation. Lichtenberg sait que c’est par le miracle même de la chute que l’homme parvient à garder les pieds sur terre. Lichtenberg sait que le miracle de la chute est ce qui provoque malgré tout l’équilibre terrestre de l’homme.
Lichtenberg pense comme si la terre sur laquelle il marche avait la forme d’un cerveau. C’est comme si pour Lichtenberg l’homme marchait sur la terre avec ses deux jambes parce que la terre était elle-même composée de deux hémisphères cérébraux, parce que la terre était elle-même la matière d’une sorte de dédoublement cérébral. Lichtenberg marche ainsi sur le cerveau de la terre, sur le cerveau d’étoiles de la terre, sur le cerveau d’étoiles paradoxales de la terre.
« Même si pour l’homme le fait de marcher sur deux jambes ne lui est point naturel, il est cependant avéré que cette invention lui fait honneur. »
Pourtant Lichtenberg ne marche pas avec deux jambes à la surface de la terre. Lichtenberg marche plutôt avec une jambe à la surface de deux terres, à la surface de deux terres à la fois. Lichtenberg marche comme un unijambiste à la surface de deux terres en même temps. Lichtenberg marche avec une jambe sur deux hémisphères cérébraux de terre à la fois, sur deux hémisphères cérébraux de terre en même temps.
La pensée de Lichtenberg apparait semblable à un rêve qui marche. La pensée de Lichtenberg apparait à la fois comme un rêve qui marche avec précision et une veille qui boite, ou encore comme un éveil qui marche avec précision et un rêve qui boite. La pensée de Lichtenberg apparait comme un rêve éveillé qui marche en boitant avec précision.
Lichtenberg marche sur la terre qui porte son nom. Lichtenberg marche sur la terre comme si la terre était une montagne de lumière. Lichtenberg marche sur la montagne de lumière de la terre.
Lichtenberg marche sur la terre avec le boitillement précis de sa tête à l’intérieur de la lune. Lichtenberg pense sur la lune avec le boitillement précis de ses pieds à l’intérieur de la terre.
A chaque saut de sa pensée Lichtenberg parvient à faire osciller la position de son corps et de sa tête. Ainsi à chaque saut de sa pensée sa tête se tient au-dessus de son corps ou à l’inverse son corps se tient au-dessus de sa tête.
Lichtenberg essaie d’apprendre à la terre comment marcher sur la tête. Lichtenberg essaie d’apprendre à la terre comment marcher sur la tête de son ombre.
Lichtenberg marche avec son crayon et écrit avec une jambe. Lichtenberg marche avec son crayon et écrit avec une seule jambe, avec une seule jambe sur plusieurs planètes à la fois.
Lichtenberg marche sur la terre avec l’envers des pieds et court sous le ciel avec la tête. Lichtenberg marche sur la terre avec l’envers des pieds et rebondit sous le ciel avec la tête.
Lichtenberg sait que l’homme se tient debout sur la terre comme s’il était pendu à un sablier. Lichtenberg sait que l’homme se tient debout à la surface de la terre comme s’il était pendu à un sablier.
Lichtenberg marche sur le fil du rasoir de l’horizon.
Lichtenberg bondit à cloche-pied sur le fil du rasoir de l’horizon. Lichtenberg bondit tête-bêche sur le fil du rasoir de l’horizon. Lichtenberg bondit à cloche-pied tête-bêche sur le fil du rasoir de l’horizon.
Lichtenberg écrit comme un funambule boiteux. Lichtenberg écrit comme un funambule boiteux à la lueur d’une bougie, comme un funambule boiteux à la lueur de sperme d’une bougie.
Lichtenberg médite à tour de rôle de son pied-bot. Lichtenberg médite à tour de rôle de son pied-bot d’étoiles. Lichtenberg médite à tour de rôle de son boitillement, à tour de rôle du pied-bot d’étoiles de son boitillement.
Lichtenberg libelle des chemins de contingences.
Lichtenberg accomplit des souffles de réflexions, des souffles de réflexions souterraines.
Horizon-Terre
Selon Elias Canetti Lichtenberg pense par sauts de puces. « Lichtenberg est une puce douée d’un esprit humain. Il possède cette incomparable force de sauter hors de soi-même - où ne bondit-il pas, ensuite ? » Malgré tout étant donné que Lichtenberg se tient déjà sur la ligne d’horizon à l’instant où il commence à penser, par ce simple saut de puce il parvient ainsi à bondir en dehors même du monde.
Lichtenberg médite comme il dépucèle l’horizon. Lichtenberg médite comme il dépucèle l’hymen de l’horizon.
Karl Kraus note quant à lui que l’écriture de Lichtenberg s’enfonce à chaque instant au plus profond de la terre. « Lichtenberg creuse plus profondément que tout autre, mais ne remonte pas à la surface. Il parle sous terre. Seul l’entend qui soi-même creuse profondément. »
Lichtenberg parvient ainsi à faire à la fois un pas au-delà de l’horizon et un pas au plus profond de la terre. Lichtenberg écrit ainsi par sauts de puces à la fois au centre de la terre et sur le fil de l’horizon comme à la fois au centre de l’horizon et sur le fil de la terre. Lichtenberg écrit par sauts de puces aussi subtils que profonds sur le fil de terre de l’horizon.
Lichtenberg écrit comme il s’enterre à l’intérieur de l’horizon. Lichtenberg s’enterre un pas au-delà de l’horizon. Lichtenberg s’enterre par le geste d’accomplir un pas au-delà de l’horizon. L’écriture de Lichtenberg semble ainsi enterrée vivante, paradoxalement enterrée vivante sur le fil de l’horizon. Lichtenberg creuse sa tombe, la tombe de son écriture, la tombe de son écriture stellaire un pas au-delà de l’horizon.
« Je suis très superstitieux et je n’en ai nulle honte, comme je n’ai nulle honte à croire que la terre est immobile : c’est le corps de ma philosophie et je remercie le Dieu de m’avoir donné une âme qui la puisse corriger. »
Lichtenberg pense comme si la terre restait immobile et que cependant son centre et son horizon tournaient sur eux-mêmes. Selon le corps de Lichtenberg la terre reste immobile et selon son âme - le trait d’esprit de son âme- le centre de la terre tourne autour de l’horizon comme l’horizon tourne autour du centre de la terre. Le centre de la terre et l’horizon composent ainsi les deux foyers paradoxaux de l’ellipse d’immobilité de la terre, de l’ellipse de paralysie de la terre.
Lichtenberg siamoise la pensée. A chaque saut de sa déraison, Lichtenberg siamoise sa pensée et médite ainsi tête-bêche. A chaque saut de sa déraison, Lichtenberg siamoise sa pensée et médite ainsi tête-bêche sur le fil de l’horizon, sur le fil d’ombre de l’horizon. A chaque saut de sa lucidité, à chaque saut de lucidité de sa déraison, Lichtenberg siamoise la pensée et tourbillonne ainsi tête-bêche sur le fil d’ombre de l’horizon.
Lichtenberg écrit sur le fil de l’horizon. Lichtenberg marche sur le fil de l’horizon.
Lichtenberg marche sur le fil de labyrinthe de l’horizon. Lichtenberg marche sur le labyrinthe de fil de l’horizon. Lichtenberg écrit sur le labyrinthe de fil de l’horizon.
Lichtenberg écrit sur le fil-labyrinthe de l’horizon et ce qu’il y a dessous ce n’est pas le monde et ce n’est pas le vide. Ce qu’il y a dessous c’est sa tête, ce qu’il y a dessous c’est le secret, c’est le grand secret indicible de sa tête coupée de son corps.
Lichtenberg marche sur la bobine de fil de l’horizon. Lichtenberg marche sur la bobine de sable de l’horizon. Lichtenberg marche sur la boussole de l’horizon. Lichtenberg marche sur la boussole de poussière de l’horizon.
Lichtenberg écrit comme une machine à coudre les grains de sable. Lichtenberg écrit comme une machine à coudre les grains de sable sur le fil de l’horizon.
Lichtenberg joue à faire tenir en équilibre le fil-labyrinthe de l’horizon sur la toupie-sablier de sa tête. Lichtenberg joue à faire tenir en équilibre le fil-labyrinthe de l’horizon sur la boussole-sablier de sa tête.
Lichtenberg écrit sur le profil de l’horizon. Lichtenberg écrit sur le fil de profil de l’horizon.
Lichtenberg se tient en équilibre sur le profil de l’horizon. Lichtenberg se tient en équilibre sur le profil de carte à jouer de l’horizon.
Le profil de l’horizon traverse le corps de Lichtenberg comme la ligne diagonale qui sépare en deux la figure d’une carte à jouer. Le profil de l’horizon est le grand secret indicible qui sépare la tête et le corps de Lichtenberg comme une figure de carte à jouer.
Celui qui se tient ainsi sur le profil de l’horizon découvre que la tête et le corps lorsqu’ils sont séparés l’un de l’autre deviennent paradoxalement des figures semblables et même des figures siamoises. Celui qui se tient ainsi à califourchon sur le profil de l’horizon découvre que la figure d’un corps sans tête apparait siamoise de la figure d’une tête sans corps.
Lichtenberg parce qu’il se tient à califourchon sur le profil de l’horizon, sur le profil de carte à jouer de l’horizon a la révélation que le corps sans tête et la tête sans corps ont malgré tout la même figure, que le corps sans tête et la tête sans corps ont la même figure de style, la figure de style du secret autrement dit celle de la vérité comme chance.
La tentation de l’écriture de Lichtenberg est de faire passer le fil de l’horizon à l’intérieur du centre de la terre. La tentation de l’écriture de Lichtenberg est de faire passer le profil de l’horizon à l’intérieur de l’aimant du centre de la terre afin de transformer ainsi la planète terre en sablier.
Pour Lichtenberg l’âme c’est l’aimant au centre de la terre.
Pour Lichtenberg l’écriture est le jeu d’allier la force magnétique de la gravitation et la ligne mentale de l’horizon. Pour Lichtenberg l’écriture tente de transformer la ligne d’horizon en point, en point magnétique, en point de gravitation, en pont magnétique de gravitation, en centre magnétique, en centre magnétique de la gravitation.
Le quasi saut sur place de Lichtenberg, son rebond métaphysique apparait provoqué par le geste de métamorphoser la ligne d’horizon en point de gravitation, par le geste de métamorphoser la limite infinie du regard en axe afini des cinq sens, en centre afini des affinités sensuelles. « Il y a très peu de choses que nous pouvons connaitre par le cinq sens à la fois. »
L’aphorisme de Lichtenberg apparait comme une forme de sursaut, une forme de sursaut de l’âme. Ce qui sursaute alors ce n’est pas un sujet à la surface de la terre, ce n’est pas une pensée à la surface de la terre. Ce qui sursaute alors c’est le centre de la terre même.
Pour Lichtenberg l’écriture est le jeu de faire sursauter l’aimant du centre de la terre comme profil de l’horizon. Pour Lichtenberg l’écriture est le jeu de faire sursauter l’aimant du centre de la terre comme ligne de l’horizon touchée de profil.
Lichtenberg écrit de face et gratte ce qu’il écrit de profil.
Lichtenberg gratte l’horizon. Lichtenberg gratte le profil de l’horizon. Lichtenberg gratte le profil de l’horizon avec son oreille, avec la spirale de son oreille, avec le jour de son oreille, avec le jour-spirale de son oreille.
Lichtenberg plutôt que lire préfère gratter avec son oreille, gratter avec le jour-figure de géométrie de son oreille. Lichtenberg plutôt que lire préfère gratter avec le lundi-triangle, le mardi-carré, le samedi-trapèze de son oreille.
Lichtenberg subtilise l’horizon. Pour Lichtenberg l’horizon n’est pas une limite de la pensée. Pour Lichtenberg l’horizon ressemble à une oreille de l’âme. Pour Lichtenberg l’horizon ressemble à une oreille musicale, une oreille-instrument de musique.
Ecrire pour Lichtenberg c’est jouer de l’horizon, c’est à la fois jouer l’horizon comme une carte ou un dé et jouer de l’horizon comme un instrument de musique.
Pour Lichtenberg l’horizon n’est ni un objet ni un sujet, ni un objet ni un sujet de la pensée. Pour Lichtenberg l’horizon ressemble plutôt à un jouet de l’âme, un objeu de l’âme ou encore à un subjeu de l’âme.
Lichtenberg n’objective par l’horizon. Lichtenberg n’assujettit pas l’horizon. Lichtenberg subjoue l’horizon. Lichtenberg à la fois sursaute et subjoue l’horizon. Lichtenberg sursaute-subjoue l’horizon par le geste de retourner l’horizon comme un sablier.
Lichtenberg enroule le cerveau de l’horizon autour de l’index du centre de la terre. Lichtenberg enroule l’œil de l’horizon autour des orteils du centre de la terre.
Lichtenberg regarde l’horizon au microscope et le grain de poussière au télescope.
Lichtenberg touche l’horizon avec le microscope. Lichtenberg touche l’horizon avec le microscope du centre de la terre.
Lichtenberg utilise l’horizon comme microscope, comme monocle, comme lunettes, comme jumelles et comme télescope.
Lichtenberg touche l’horizon avec un microscope de dentelles. Lichtenberg touche l’horizon avec un microscope de broderies. Lichtenberg touche l’horizon avec un microscope de broderie et change ainsi l’horizon en point de flair, en point d’odorat.
Lichtenberg flaire l’horizon avec une lentille rapetissante. Lichtenberg touche flaire l’horizon avec le microscope du hasard, avec le microscope du rêve, avec le microscope du hasard rêvé.
L’horizon est la boite à outils de Lichtenberg.
Selon Lichtenberg l’horizon n’est pas une ligne qui limite une vision. Selon Lichtenberg l’horizon est plutôt un outil, une ride ou une bosse, la ride de l’âge de l’espace.
L’horizon est la ride de l’oreiller de Lichtenberg. L’horizon est l’empreinte fossile de la tête de Lichtenberg quand il somnole. L’horizon est à la fois l’empreinte de la somnolence et l’outil de la somnolence de Lichtenberg.
Lichtenberg déboussole l’horizon. Lichtenberg déboussole l’horizon par le jeu d’entrelacer l’horizon au centre de la terre. Lichtenberg déboussole le fil de l’horizon par le jeu d’entrelacer l’horizon à l’âme du centre de la terre, à l’âme de feu du centre de la terre.
Lichtenberg démange l’horizon. Lichtenberg démange la ligne d’horizon. Lichtenberg chantourne la ligne d’horizon. Lichtenberg démange chantourne la ligne d’horizon.
Lichtenberg se tient accoudé à la balustrade de l’horizon. Lichtenberg se tient coudé au balcon de l’horizon. Lichtenberg batifole parmi les éclairs accoudé au balcon de l’horizon.
Lichtenberg éclipse la ligne d’horizon avec le sourire de son ombre. Lichtenberg éclipse la ligne d’horizon selon le sourire de son ombre.
Lichtenberg retourne l’immobilité de la terre comme un sablier. Lichtenberg retourne l’immobilité de la terre comme un sablier d’éclairs.
« N’objectons pas ici que nous connaissons notre esprit, notre moi, mieux que la terre. »
C’est comme si pour Lichtenberg l’homme n’était pas apte à connaitre en même temps sa pensée et la terre, à connaitre à la fois sa pensée et la terre. C’est comme si pour Lichtenberg l’homme n’était pas apte à connaitre à la fois la position et la vitesse de sa pensée et la position de la vitesse de la terre. Ainsi pour Lichtenberg quand l’homme connait la position de sa pensée et la vitesse de la terre il n’est pas apte à connaitre la vitesse de sa pensée et la position de la terre. Et à l’inverse quand l’homme connait la vitesse de sa pensée et la position de la terre il n’est pas apte à connaitre la position de sa pensée et la vitesse de la terre.
« L’homme n’est fait que pour façonner la surface de la terre ; mais les constructions et les restaurations qui vont davantage en profondeur, la nature se les conserve. »
Lichtenberg a ainsi la tentation de façonner le centre de la terre. Lichtenberg a ainsi la tentation de façonner le centre de la terre par la raison du rêve comme par le rêve de la raison. Lichtenberg a la tentation de façonner le centre de la terre comme surface, la tentation de toucher, de manipuler, de manœuvrer la surface du centre de la terre.
Lichtenberg a la tentation de révéler la superficie de tact, la superficie de doigts, la superficie d’empreintes digitales du centre de la terre. Lichtenberg a la tentation de révéler l’échiquier d’empreintes digitales du centre de la terre.
Lichtenberg n’est ni le citoyen d’un pays ni le citoyen de la terre. Lichtenberg essaie plutôt de devenir à la fois le citoyen de l’horizon et le citoyen du centre de la terre. Lichtenberg essaie de devenir le citoyen de l’horizon au centre même de la terre.
Il y a un tellurisme étrange chez Lichtenberg, un tellurisme du tact, un tellurisme du fil, un tellurisme brodé.
Lichtenberg enrubanne les tremblements de terre. Lichtenberg enrubanne les tremblements de terre avec le sourire de son ombre.
Lichtenberg brode le volcan. Lichtenberg transforme le volcan en sablier de broderies. Lichtenberg transforme le volcan en sablier de dentelles.
Lichtenberg brode l’aimant de feu du centre de la terre avec la ligne de l’horizon. Lichtenberg brode l’aimant de feu du centre de la terre avec la ligne mentale de l’horizon.
Lichtenberg retourne l’horizon au centre de la terre comme un sablier afin de transformer l’horizon en signe de l’infini, afin de transformer l‘horizon en signe de l’infini de l’âme.
Lichtenberg retourne la ligne d’horizon au centre de la terre afin de transformer ainsi le cosmos en sablier, en sablier du signe de l’infini de l’âme.
Le signe de l’infini de l’horizon est l’échine de l’âme de Lichtenberg. Le sablier du signe de l’infini est l’échine de l’âme de Lichtenberg.
Poussière
Lichtenberg cisèle les bijoux de la poussière. Lichtenberg cisèle les bijoux de la poussière avec le sourire de son ombre.
Lichtenberg cisèle des bijoux d’ombre. Lichtenberg cisèle des bijoux d’ombre avec le paratonnerre de la poussière. Lichtenberg cisèle des bijoux de poussière avec des paratonnerres d’ombre. Lichtenberg cisèle des bijoux de poussière avec des paratonnerres d’herbe.
Lichtenberg sait comment immiscer des yeux à l’intérieur d’un grain de poussière. Lichtenberg pense comme il parvient à immiscer un œil de mouche à l’intérieur d’un grain de poussière.
Lichtenberg sait comment construire un palais de roi à l’intérieur d’un grain de poussière. Lichtenberg sait comment incruster un palais de regards, un palais de regards princiers à l’intérieur d’un simple grain de poussière.
Lichtenberg pense comme il passe une bague de fiançailles à une rotative d’imprimerie. Lichtenberg pense comme il passe la bague de fiançailles d’un œil à la rotative d’imprimerie de la poussière.
« Ton âme n’est point trop humble pour le monde. »
Lichtenberg sait que l’homme qui s’est mis une fois à genoux devant un grain de poussière n’a plus à se mettre à genoux devant le monde. Lichtenberg sait que l’homme qui s’est mis une fois à genoux devant un grain de poussière a seulement ensuite à jouer avec le monde, a seulement ensuite à jouer avec le miracle du monde, avec le miracle lointain du monde.
Lichtenberg sait comment poser plusieurs siècles au sommet d’un grain de poussière. Lichtenberg sait comment poser mille ans au sommet d’un grain de poussière.
Les aphorismes de Lichtenberg apparaissent semblables à des grains de poussière en suspens dans un rayon de lumière. Les aphorismes de Lichtenberg apparaissent aussi semblables à des grains de clarté en suspens à l’intérieur de la roue de la poussière.
L’écriture de Lichtenberg est celle d’une hésitation absolue. Pour Lichtenberg il reste à jamais tabou de savoir si c’est la lumière qui révèle la poussière ou la poussière qui révèle la lumière (et aussi si c’est la poussière dissimule la lumière ou si c’est la lumière qui dissimule la poussière.)
Lichtenberg écrit du point de vue d’une poussière de clarté en équilibre sur le fil de l’horizon. Lichtenberg écrit du point de vue d’une poussière de clarté assise à califourchon sur le fil de l’horizon.
Lichtenberg joue aux cartes avec le désert. Lichtenberg joue aux cartes avec le désert de la lumière. Lichtenberg joue aux cartes avec la liste de la poussière. Lichtenberg joue aux cartes avec la liste de poussière de la clarté.
Lichtenberg fait passer le désert par le trou de l’aiguille. Lichtenberg change le désert en sablier. Lichtenberg fait passer le désert par le trou de l’aiguille, renverse l’aiguille et change ainsi le désert en sablier. Lichtenberg retourne l’horizon du désert comme un sablier.
Lichtenberg c’est l’homme-sablier. Lichtenberg écrit du point de vue du sablier. Lichtenberg sait que le sablier est une lentille de vision et qu’à l’inverse les lunettes sont des horloges.
Lichtenberg utilise le sablier afin d’examiner les gestes d’orgueil de la poussière.
Lichtenberg sait que le sablier est une machine à transsubstantier le vide. Lichtenberg tamise la transsubstantiation du vide avec le sablier.
Lichtenberg tamise la boule de cristal avec le sablier. Lichtenberg tamise les visions de la boule de cristal avec le tact du sablier.
Lichtenberg pèse sa parole avec un sablier. Lichtenberg palpe le passage du temps avec une boussole et pèse ses paroles avec un sablier.
Lichtenberg tente d’apprendre à voler à l’intérieur d’un sablier.
Lichtenberg essaie d’apprendre à voler en bondissant d’un grain de sable à un autre, en bondissant d’un grain de temps à un autre, en bondissant d’un grain de temps à un autre à l’intérieur d’un sablier.
A chaque phrase Lichtenberg retourne le cosmos comme un sablier. A chaque phrase Lichtenberg retourne le sablier du vide et à chaque blanc, il retourne le sablier du langage.
Lichtenberg allonge le sablier. Lichtenberg allonge le sablier comme un cœur de femme. Lichtenberg allonge le sablier au centre de la terre. Lichtenberg allonge le sablier au centre de la terre comme un cœur étincelant de femme.
Lichtenberg révèle les minauderies des minéraux. Lichtenberg révèle les minauderies de rêve des minéraux.
Lichtenberg balaie les diamants à brûle-pourpoint. Lichtenberg balaie la poussière de diamants à brûle-pourpoint.
L s’amuse à faire bruisser une poussière de diamants à l’intérieur du sablier de sa bosse, à l’intérieur du sablier de son squelette.