Bourvil
Il y a une titubation infaillible de Bourvil. Bourvil titube à la fois musculairement et verbalement. Bourvil titube musculairement et verbalement à l’intérieur de l’infaillibilité de son émotion, à l’intérieur de l’infaillibilité de son feeling.
Bourvil joue comme un jazzman paysan. Bourvil joue comme un jazzman gardien de vache, un jazzman qui garde les vaches de ses rêves.
Bourvil joue comme un accordéoniste de la voix, comme un accordéoniste éberlué de la voix. Il y a une bravoure de Bourvil, une bravoure éberluée de Bourvil et une lubricité bonhomme aussi.
Il y a une bonhommie bredouillée de Bourvil. Bourvil improvise le bredouillage. Bourvil improvise le bredouillage comme forme de la vertu, comme forme de l’honnêteté. Bourvil improvise le bredouillage comme vertu stoïque, comme honnêteté stoïque.
Bourvil brouille son élocution avec le mouvement aberrant de ses jambes. C’est une technique semblable à celle de Groucho Marx, à cette différence près qu’alors que cette technique produit un bourdonnement d’arrogance chez Groucho elle engendre plutôt une brume d’humilité chez Bourvil.
Bourvil parle comme s’il mâchait à chaque instant du papier-buvard. Les voyelles et les consonnes débordent sans cesse les unes sur les autres. L’ébullition de son élocution déguingande alors sa bouche.