Sensations de l’Enfant

 

 

 

L’enfant gobe les fenêtres. L’enfant gobe les fenêtres comme des cerises.

 

L’enfant gobe la sphère de pluie des fenêtres. L’enfant gobe la ruche de pluie des fenêtres. L’enfant gobe la cloche de pluie des fenêtres.

 

L’enfant gobe le toboggan. L’enfant gobe le toboggan de pluie des fenêtres. L’enfant gobe le toboggan de fenêtres de l’amnésie.

 

L’enfant ouvre et ferme les fenêtres à l’intérieur du noyau des fruits. L’enfant ouvre et ferme les fenêtres avec le noyau des fruits. L’enfant ouvre et ferme les fruits avec le noyau des fenêtres.

 

L’enfant touche le magma des fenêtres et le magma des fenêtres regarde par l’enfant.

 

 

L’enfant sait que les nuages restent immobiles et que seul le ciel bouge. L’enfant sait que le ciel bouge autour de l’immobilité des nuages.

 

L’enfant sait que la lisière des forêts est le cimetière des regards. L’enfant sait que la forêt est le cimetière du ciel.

 

L’enfant se promène à l’intérieur du cimetière du feu.

 

 

L’enfant forge l’herbe. L’enfant forge les sourcils de l’herbe.

 

L’enfant regarde la clef par le trou du cyclone.

 

L’enfant poignarde le champ de blé avec la clef.

 

L’enfant regarde le vent dormir à l’intérieur des statues.

 

L’enfant sait que la botte de paille est le tabouret du soleil.

 

L’enfant regarde chaque grain de sel comme la toupie d’un volcan.

 

 

L’enfant flaire la cathédrale de l’écorce.

 

L’enfant hume le brouillard des escargots.

 

L’enfant inhale le sous-marin de son sourire. 

 

L’enfant examine la cérémonie de caoutchouc du printemps.

 

L’enfant fait la sieste à l’intérieur du lierre du soleil.

 

L’enfant transforme son cerveau en pieuvre à force de regarder le feu.

 

L’enfant cueille le regard de ses tempes avec l’odeur du tilleul.

 

 

L’enfant sait que les bancs de pierre murmurent des rebonds de mousse. L’enfant sait que les bancs de pierre appellent à chaque instant la giboulée du soleil, la giboulée de bonjours du soleil.

 

L’enfant sait que l’escalier est un arc-en-ciel de mousse. L’enfant descend les escaliers comme une lave de cris sucrés. L’enfant glisse sur la rampe pour renverser l’escalier comme un sablier.

 

L’enfant sait que la mousse fume son nombril accroupie sur son menton. L’enfant sait que la mousse fume les sourcils de son nombril accroupie sur le front de son menton. L’enfant sait que la mousse fume les sourcils de son nombril accroupie sur les oreilles de son menton.

 

 

L’enfant sait que les bulles butinent l’air. L’enfant sait que les bulles de savon butinent  l’alcool de l’air.

 

L’enfant sait que les balançoires sont les tabourets du vent. L’enfant sait que les balançoires sont les tabourets du cyclone.

 

L’enfant écoute les taille-crayons ronronner et regarde les crayons dormir. L’enfant écoute les taille-crayons ronronner et regarde les chats écrire.

 

 

L’enfant sait que les aimants ont des mains de coudes.

 

L’enfant sait que l’aimant est le marteau du coton. L’enfant sait que l’aimant est le marteau contagieux du coton.

 

L’enfant touche le coton afin de connaitre la mémoire de l’intact. L’enfant touche le coton afin de savoir à quoi ressemble la matière du temps. L’enfant touche le coton afin de savoir à quoi ressemble la main du brouillard, afin de savoir à quoi ressemble la bouche invisible du brouillard, afin de savoir à quoi ressemble le nid du brouillard au cœur du vide. L’enfant touche le coton afin de savoir à quoi ressemble la bouche en cœur du brouillard. L’enfant touche le coton pour savoir à quoi ressemble le bébé du brouillard. L’enfant sait que le coton a des sourires de nuage endormi. L’enfant sait que le coton a des sourires de bébé nuage.

 

 

L’enfant sait que les morceaux de verre restent là très très vite.

 

L’enfant sait que les tessons de verre sont des syllabes de falaise.

 

L’enfant sait que le papier de verre a un désert sur la langue.

 

L’enfant sait que le papier de verre est la carte de géographie du vide.

 

L’enfant sait que le papier de verre est la carte de visite du désert. L’enfant sait que le papier de verre respire la fumée du désert. L’enfant sait que le papier de verre respire la fumée de soleil du désert.

 

 

L’enfant trouve des mentons dans les tessons de bouteilles. L’enfant trouve des mentons de montagne dans les tessons de bouteilles.

 

L’enfant sait que l’eau qui bout est le bain des cercueils invisibles.

 

L’enfant sait qu’un regard de tendresse somnole à l’intérieur des bâtons de dynamite.

 

L’enfant sait que la cible est le lit des abeilles. L’enfant sait que la cible est le lit de travail des abeilles.

 

L’enfant crie des carrés. L’enfant crie des soleils carrés. L’enfant crie des caresses de carrés. L’enfant crie des caresses de soleils carrés.

 

L’enfant aime la voix de hache du corbeau.

 

L’enfant sait que les brins d’herbe sont les réverbères des fourmis.

 

L’enfant découvre des nids de chants d’oiseaux à l’intérieur de l’odeur de la sciure.

 

L’enfant cache des tiroirs à l’intérieur des secrets. L‘enfant cache des tiroirs d’attente à l’intérieur de la sciure des secrets.

 

 

L’enfant entend parfois sonner les cloches à l’intérieur des tortues.

 

L’enfant écoute sonner les cloches comme des planètes. L’enfant écoute sonner les cloches comme des planètes d’enclumes.

 

L’enfant suce les ressemblances comme des dés de bonbons.

 

L’enfant écoute les bonbonnes de gaz sonner comme des cloches de glace.

 

L’enfant excite la tortue du recommencement. L’enfant excite la tortue de coton du recommencement.

 

L’enfant sait que l’orage joue au ping-pong avec les lobes d’oreilles. L’enfant sait que le tonnerre joue au badminton avec les tympans.

 

L’enfant sait que les boules de billard se cognent les unes contre les autres comme le front des bouquetins dans l’air froid des montagnes.

 

 

 

L’enfant regarde les clous rouillés comme s’ils revenaient d’extrêmement loin, d’une autre planète. L’enfant regarde les clous rouillés comme s’ils étaient des queues de météores.

 

L’enfant examine le silex comme un menhir d’allumettes.

 

L’enfant sait que le silex est un menhir luisant comme un cil. L’enfant sait que le silex est le menhir des coccinelles.

 

L’enfant contemple la profondeur du puits au sommet de l’allumette.

 

L’enfant savoure la connivence du puits et de l’allumette. L’enfant savoure avec le rêve de ses tempes la connivence du puits et de l’allumette.

 

L’enfant sait qu’il existe plusieurs cathédrales à l’intérieur d’une seule allumette.

 

L’enfant ouvre la boite d‘allumettes comme une bibliothèque d’innombrables silences.

 

 

L’enfant hume le météore du pain. L’enfant hume le météore de repos du pain. L’enfant hume le météore de paix du pain.

 

L’enfant hume l’odeur du pain chaud avec le même tremblement de plaisir que l’odeur des chemises qui viennent d’être repassés. L’enfant sait qu’il existe une boulangerie du linge et une lingerie du pain. L’enfant sait qu’il existe une boulangerie du linge et une imprimerie du pain.

 

L’enfant caresse les cataclysmes à loisir. L’enfant caresse les boites à lettres du cataclysme à loisir. L’enfant caresse l’oxygène des cataclysmes à loisir. L’enfant caresse les boites à lettres de l’oxygène à loisir.

 

 

L’enfant sait que la fumée est le ressort des ombres. L’enfant sait que la fumée est le ressort de soif des ombres. L’enfant sait que la fumée est le ressort de colère des ombres, le ressort de colère funambule des ombres.

 

L’enfant fume le lait. L’enfant fume les chansons. L’enfant fume le lait des chansons.

L‘enfant fume la fraicheur des chansons. L’enfant fume l’eau des chansons. L’enfant fume le verre d’eau des chansons. L’enfant fume la clepsydre des chansons.

 

L’enfant fume la fraicheur du tabac. L’enfant fume la fraicheur de papier du tabac.

 

L’enfant fume les cigarettes des statues. L’enfant apprend à fumer le papier auprès des statues.

 

L’enfant respire la forme de son front avec la fumée du thé. L’enfant respire le regard de son front avec la fumée du thé. L’enfant apprend à respirer la forme de son amnésie à l’intérieur de la fumée de son bol de thé.

 

L’enfant sait que les cigarettes sont des cierges de thé.

 

 

 

L’enfant palpe la pelote de laine comme un ballon d’ailes. L’enfant palpe la pelote de laine   comme le poumon du vide. L’enfant palpe la pelote de laine pour respirer avec un troisième poumon. L’enfant palpe la pelote de laine comme un sein de souffles, comme une poitrine de souffles.

 

L’enfant sait que les pelotes de laine peaufinent des lettres d’amour. L’enfant sait que les pelotes de laine télégraphient des lettres d’amours aux tonneaux de vin.

 

 

L’enfant sait que fermer les volets c’est presser le vin des fenêtres.

 

L’enfant sait que le vent est le vin de temps de l’espace.

 

 

L’enfant sait que la chaise est la flèche du savon.

 

L’enfant sait que le savon sculpte le squelette du vent.

 

L’enfant sait que les gouttes de pluie nagent à cloche-pied.

 

L’enfant sait que le tabouret est l’arc du nuage.

 

 

L’enfant casse les serrures afin de souffler le sourire des escaliers. L’enfant casse les serrures afin de souffler le fou-rire des escaliers.

 

L’enfant joue avec les serrures comme si c’étaient des boites à musique. L’enfant essaie de faire parler les portes en tournant les clefs à l’intérieur des serrures. L’enfant pense qu’à force de tourner la clef à l’intérieur de la serrure, la porte finira par parler, la porte finira par parler des notes de musique.

 

L’enfant ouvre les serrures comme des fenêtres. L’enfant ouvre les serrures comme des fenêtres de féerie. L’enfant ouvre les serrures comme des fenêtres de comme si comme ça.

 

L’enfant regarde les serrures voler à l’intérieur de la rivière.

 

L’enfant sait que les ponts sont parfois aussi les clefs de la rivière.

 

L’enfant sait que les clefs sont parfois aussi des ponts qui relient une rivière à une maison.

 

L’enfant sait que la chaise est parfois aussi un pont qui relie un vide à un autre vide.

 

L’enfant sait que quand un pont relie un vide à un autre vide, la rivière roule sur le pont.

 

 

L’enfant épluche la lune avec l’hélicoptère.

 

L’enfant fume le dauphin avec le magnétophone.

 

L’enfant joue au bowling avec les vagues de l’océan.

 

 

L’enfant sait que les boomerangs sont les coudes des nageoires de baleine.

 

Quand la lune montre le doigt, l’enfant regarde la lune.

 

L’enfant sait que la lune fait du delta-plane sous les ongles. L’enfant sait que la lune joue au freezebee sous les ongles. L’enfant sait que la lune joue au boomerang sous les ongles.

 

L’enfant sait que le rabot est le fer à repasser du bois.

 

L’enfant sait que le moulin à café ronronne des cataclysmes.

 

 

L’enfant sait que le panier est très patient. L’enfant sait que le panier est une échelle lovée sur elle-même comme un chat. L’enfant sait que le panier est une chaise qui dort enroulée sur elle-même comme un chat.

 

L’enfant sait que les paniers sont les chaises des mains. L’enfant sait que les paniers sont les chaises des mains et les canapés des doigts. L’enfant sait que les racines sont les chaises des empreintes de doigts.

 

L’enfant sait que les chaises sourient parfois comme des sous-marins.

 

L’enfant sait que les échelles apprennent à chanter aux murs.

 

L’enfant cherche à savoir si l’échelle rêve aux vaches ou aux hirondelles.

 

 

L’enfant voit parfois avancer les églises très lentement sur la terre comme des escargots.

 

L’enfant est parfois troublé par les apostrophes télégraphiques des feuilles d‘automne. L’enfant est parfois troublé par les apostrophes de macération lumineuse des feuilles d’automne.

 

L’enfant balaie la poussière à l’intérieur des arbres et recouvre le plancher de feuilles mortes.

 

L’enfant sait que la brouette est le side-car de l’écorce. L’enfant sait que la brouette est le side-car des escargots.

 

L’enfant sait que les contrebasses sont sculptées à l’intérieur du cœur des arbres.

 

 

A chaque fois que l’enfant entend le bruit des sabots de chevaux sur la route, il sait que la terre est aussi le souterrain du ciel.

 

L’enfant regarde les vaches voler sur le plancher des mouches.

 

L’enfant sait que la vache chante dans le noir pour s’endormir.

 

 

L’enfant regarde les avions voler en dehors du ciel.

 

L’enfant sait qu’il y a des yeux d’avions à l’intérieur de l’odeur de l’éther. 

 

L’enfant sait que les ciseaux sont les avions d’un ciel de papier.

 

L’enfant ne craint pas les rivières de ciseaux.

 

L’enfant prend et jette les ciseaux par la fenêtre du vent.

 

L’enfant fait des bouquets de ciseaux avec le parfum des fleurs.

 

 

L’enfant regarde les gueules de la poussière sous son lit.

 

L’enfant sait que la chaux est de la farine de cailloux.

 

L’enfant sait comment chanter la silhouette des haies.

 

L’enfant sait que le tas de rondins de bois suçote la main de pouces du désespoir.