Bonjour Laurent,
Je viens de découvrir un livre de Robert Dumas intitulé Traité de l’Arbre. Il me semble que cela pourrait t’intéresser. La thèse principale du livre est très simple. « L’arbre serait le symbole par excellence, le modèle de tout symbole. » « Puissant foyer d’images, l’arborescence provoque l’imagination. L’arbre apparait comme un « méta-élément » car il dépasse les quatre éléments matriciels non pas en les additionnant, mais en les synthétisant organiquement. » Robert Dumas cherche aussi à relier le symbole de l’arbre aux structures conscientes ou inconscientes de la philosophie occidentale. Il y a à ce propos de nombreuses remarques intéressantes.
J’ai parlé avec mon ami paysagiste du problème de la torsion du pommier en plein champ, ton hypothèse de la cardinalité de l’arbre lui semble recevable. L’autre hypothèse ce serait peut-être que le pommier quand il pousse à l’intérieur des pépinières se tourne d’abord du côté des lampes électriques qui y sont disposées et qu’ensuite quand il pousse en plein champ se tourne du côté de la lumière du soleil. Si la position des lumières artificielles de la pépinière et de la lumière naturelle du champ ne sont pas les mêmes, l’arbre alors se tordrait.
J’ai rencontré Julien Starck à la lecture des auteurs du Corridor Bleu à Paris. En dehors d’Ivar qui a survolé la soirée, J. Starck est le seul à avoir proposé quelque chose d’intéressant. Une sorte hybridation bizarre de Hölderlin et d’Allen Ginsberg, quelque chose comme un léger désordre de l’esprit cependant résolument dirigé. Je suis ensuite allé le voir après sa lecture. Je l’ai trouvé net, lucide, avec une sorte de fébrilité tranquille et un timbre de voix un brin charmeur agréable.
La lecture d’Ivar a été magnifique, magnifique dans ses maladresses même. Ivar a eu en effet un instant de trouble quand il lisait son texte à propos de la beauté. Sa voix s’est déchirée précisément à l’instant où le texte parle de l’aspect déchirant de la beauté. Ivar s’est alors tranquillement arrêté de lire puis a repris sa lecture en revenant quelques phrases en arrière. Ce très grand calme à l’intérieur même de l’émotion, c’était ainsi encore plus beau.
Post-scriptum.
J’ai aussi vu Mon Ame par Toi Guérie de François Dupeyron. Nous en reparlerons si cela te tente.
A Bientôt Boris
Cher Boris,
(…)
J'ai eu des échos de la soirée du Corridor bleu par Ivar, et par Julien qui était enchanté de faire ta rencontre. (…) Oui Julien est charmant, son enthousiasme et sa jeunesse fougueuse me plaisent (et sa structuration intellectuelle, aussi). Il faut que je lui écrive pour répondre à l'envoi de son livre, pas eu le temps de le faire encore. Sa poésie m'intrigue malgré un certain archaïsme formel qui me gêne quelque peu. Je suis content que vous vous soyez bien entendu.
(…)
Bon oui il faudra qu'on reparle des arbres et du film de Dupeyron.
Je t'envoie dans les prochains jours un petit livre que je publie.
Amicalement à toi,
Laurent