Bonjour Léonore,  

 

 

 

D’abord un extrait de Breton à propos de Kandinsky où Breton compare la forme de la peinture de Kandinsky à celle d’un disque (ainsi donc Kandisquy). 

« La ligne est par lui rendue à sa nécessité véritable : c’est le fil d’Ariane qui permet de se retrouver dans le dédale des apparences, abstraction faite de ce qui pourrait constituer  extérieurement l’unité individuelle des objets. Ce fil tout oriental unit la robe des pagodes à celle des tourbillons, la déchirure de l’éclair au sillon imprimé dans la cire du disque par les vibrations de la voix, le réseau nerveux à l’intrication, dans la rade, des cordages de navires. Une certaine ponctuation, inventée par Kandinsky, ne fait qu’un du ciel constellé, de la page de musique et des œufs de tous les nids. Chez lui la couleur vient combler avec une exubérance sans égale les formes pures ainsi délimitées. Elle leur prête toute la séduction d’une poudre qu’on croirait ravie aux ailes des papillons. » (Le Surréalisme et la Peinture)  

 

 

Elles aussi les montagnes, les montagnes tombent. Les montagnes tombent du ciel, dans le ciel. 

 

Cela serait à rapprocher d’une phrase de S. Pey « La falaise tombe de la falaise. »

 

 

« On devrait apprendre à vivre davantage dans les escaliers. Mais comment ? »  G. Pérec, Espèces d’Espaces 

 

Quand nous parlons à l’intérieur des escaliers, nous parlons à cloche-pied, nous parlons le cerveau à cloche-pied. Quand nous parlons à l’intérieur des escaliers, c’est comme si nous jouions à la marelle avec le langage. C’est pourquoi quand nous parlons ainsi à l’intérieur des escaliers, nous accomplissons souvent des lapsus de pas et de mots, des lapsus de pas comme de mots et parfois même des lapsus de mémoire. Alors nous marchons sur un morceau de langage à l’intérieur du passé ou encore nous patinons sur un morceau du futur à l’intérieur d’une phrase présente. 

 

 

« Je mets un tableau sur un mur. Ensuite j’oublie qu’il y a un mur. (…) Il faut pouvoir oublier qu’il y a des murs et l’on n’a rien trouvé de mieux pour ça que les tableaux. »  G. Pérec,  Espèces d’Espaces 

 

De même qui sait quand je mets un disque, j’oublie ensuite qu’il y a des portes et des fenêtres.  Ainsi nous écoutons aussi de la musique afin d’oublier qu’il y a des portes et des fenêtres.  Nous écoutons aussi de la musique afin d’oublier qu’il y a des ouvertures à l’intérieur des murs. Ou encore nous écoutons de ma musique afin de faire tourner les murs sur eux-mêmes, afin de faire tourner les murs sur eux-mêmes comme des toupies, afin de faire tourner les murs sur eux-mêmes comme des bijoux, comme des bijoux-toupies, ou encore comme des os, comme des os-bijoux ,comme des os-toupies, comme des os-bijoux-toupies. 

 

 

 

« Les arbres des villes, je ne les vois que le dimanche. » 

 

 

 

Avec cette fois en écho une autre phrase de S. Pey « Les arbres du dimanche rôdent autour de la maison. » 

Et aussi un extrait de R. Juarroz « L’arbre est une leçon de présence. (…) La chanson par contre est toujours une forme de l’absence. (…) Mais la présence n’est pas la seule magie. Magie est aussi l’absence. C’est pourquoi l’arbre et la chanson seront toujours ensemble. » 

 

 

Enregistré dans un ancien atelier de forgeron, "Feigen Feigen" 

 

La phrase est une seule et se livre sans répit à la pesée des mondes flottants.  

 

 

 

Chanter ce serait savoir comment forger le flottement. Chanter ce serait savoir comment forger l’eau ou encore savoir comment flotter à la surface du feu. Chanter ce serait savoir comment forger le flux de l’eau comme flotter à la surface des bégaiements du feu.

 

Celui qui savait aussi magnifiquement forger le flottement et surtout pour reprendre une de ses formules « flotter aux orgues sous-marins », formule qui était d’ailleurs une sorte d’anagramme phrasé de son nom, c’était Jules Laforgue (Il y aurait alors pour accompagner ta rêverie à propos des fonds marins,  têtes flottantes à la surface du globe : ainsi coiffes d’évêques, drapés haute couture, têtes d’aquarium  un texte de ses Moralités Légendaires intitulé L’Aquarium.)  

 

 

Enfin une remarque à propos de G. Stein 

 

 

G. Stein n’a pas écrit « une rose est une rose est une rose. », G. Stein a écrit « Rose est une rose est une rose. ». Sa formule révèle ainsi la relation entre un prénom et une chose. La formule de G. Stein ne dit pas : une chose est une chose est une chose. La formule de Gertrude Stein dit : un prénom est une chose est une chose. G. Stein ne dit pas ainsi seulement un prénom est une chose. G. Stein dit un prénom est une chose est une chose. Ainsi pour G. Stein le prénom n’est pas l’équivalent de la chose, le simple équivalent de la chose. Pour G. Stein le prénom est l’équivalent de la répétition de la chose. Ainsi pour G. Stein ce qui prénomme c’est la répétition, ce qui prénomme c’est la répétition de la chose. 

 

 

 

Post-scriptum. 

 

 

Je t’envoie ci-joint des extraits d’une étude à propos de G. Stein. (Il y a encore quelques passages un peu bancals. Le texte me semble malgré tout présentable.)  

 

 

 

 

 

 

 

                                                                                                  A Bientôt                         Boris