Statues des Voix
Bonjour Léonore,
Il y a dans une interview de Fellini cette apologie très simple de la chanson. « Je suis convaincu que si, à la fin de notre vie, il nous était permis de dire quelque chose, et si nous étions vraiment sincères, nous chanterions une chansonnette, en tant que résumé de toute une existence. » Ce serait à rapprocher des phrases de Fanny Ardant dans La Femme d’à Côté de François Truffaut.
Dans Autobiographie de tout le Monde Gertrude Stein s’amuse à comparer Braque à un chanteur. « Braque était un homme qui avait un don pour le chant, comme tous ceux qui chantent il était capable de prendre ce qu’il chantait pour quelque chose qu’il avait dit mais ce n’est pas la même chose. Quand je dis qu’il chantait, je veux dire qu’il chantait dans sa peinture, autrement je ne crois pas qu’il chantait mais il aurait pu, il avait la voix et l’allure d’un grand baryton. » Je me demande si ce que Gertrude Stein écrit à propos de Braque ne vaudrait pas aussi et surtout à propos de Kandinsky. Il y a en effet une séduction vocale de Kandinsky, une séduction à la fois citronnée et stellaire de Kandinsky. Kandinsky peint en effet des sortes d’agrumes sidérales, des pelures d’oranges quasi armillaires, il invente un mikado de spirales, un mikado de spirales où se superposent les étoiles et les citrons, ou plutôt où se coudoient les étoiles et les citrons, où se coudoient de salutations distinguées les étoiles et les citrons.
Etrange statue semi-cul de jatte de Gertrude Stein, à la fois scindée aux genoux et posée sur un piédestal. Elle ressemble alors à une sorte de grand-mère idéale, une sorte de grand-mère-Bouddha, une grand-mère-Bouddha assise sur le coussin de songes de son postérieur (celui qui poste des lettres à la postérité). Et ses mains disposées au-dessus du pli horizontal de sa jupe, c’est audacieux de la part de Jo Davidson. Cela donne l’impression que Gertrude Stein essaie de s’auto-propulser, de s’auto-propulser parmi l’espace. (Un peu comme le baron de Münchhausen cherche à se soulever lui-même au-dessus du sol en se tirant par les cheveux.) On dirait alors qu’elle se tient assise, qu’elle se tient assise sur une sorte de fauteuil de manège, pourtant elle ne se tient pas assise sur une montagne russe, elle se tient plutôt assise sur une montagne américaine. Gertrude Stein se tient tranquillement assise sur le grand canyon. Ou bien encore Gertrude Stein se tient assise au sommet de son piédestal comme à l’intérieur d’un fauteuil d’avion. On dirait alors une cosmonaute d’argile, une astronaute de glaise, une astronaute de glaise semi-cul de jatte qui se tiendrait assise sur ce qu’elle appelait la solidité de l’air. « Mais pour ce qui était de l’avion nous ne savions rien et c’était une chose extraordinairement naturelle et agréable bien plus simple et naturelle que n’importe quoi même marcher, aussi naturelle que parler peut-être mais certainement plus naturelle que de faire n’importe quoi d’autre.(..…) En réalité je n’étais pas étonnée que d’être si haut ça n’ait rien d’effrayant. (…) C’est d’une certaine façon à ce moment-là que j’ai vraiment commencé à savoir à quoi ressemblait le sol. (…) Une chose me tracassait comment se faisait-il que rien ne se passait alors que j’étais si haut dans le ciel. Si vous allez dans la montagne pas très haut tout arrive, vous vous sentez toute drôle même si vous n’avez pas peur parce que le fait d’être si haut vous donne le sentiment de la hauteur mais d’être vraiment aussi haut que vous puissiez l’être ne vous donne pas l’impression d’être haut. Et j’ai su immédiatement et c’était vrai que l’air sous moi est solide quand on est au-dessus, il est aussi solide que l’eau. Si vous êtes sur quelque chose de solide tout de suite après alors ce n’est pas solide du tout, mais si vous êtes tout de suite au-dessus et que vous ne vous y attendiez pas alors c’est solide aussi solide que l’eau et on n’a pas peur. Et puis après tout tout le monde sait que des gens sont tombés d’une falaise sans se tuer si bien qu’ils peuvent s’en souvenir mais celui qui tombe du haut de l’air se tue et donc personne ne peut s’en souvenir après. Quoi qu’il en soit, je n’avais pas peur du tout. » Autobiographie de tout le Monde
« il existe un ciel » (Laurent Albarracin)
il existe un ciel ou je retombe que je retombe et je me mets dans la chose et je fais faire la chose pour qui je suis gigogne et le monde avec moi.
Savoir où se trouve le ciel. Parfois le ciel se trouve au-dessus de la terre et parfois aussi le ciel s’y perd. Parfois le ciel se trouve au-dessus de la terre où il essaie de se perdre. Et parfois le ciel se perd au-dessus de la terre où il essaie de se trouver. Parfois le ciel se trouve à l’intérieur du lieu où il se perd et parfois le ciel aussi se perd à l’intérieur d’un autre lieu que celui où il se trouve. Et parfois encore il y a une statue. Parfois il a une statue qui se tient précisément entre terre et ciel. Parfois il y a une statue qui se trouve précisément entre la trouvaille du ciel et la perte de la terre ou entre la trouvaille de la terre et la perte du ciel. Les statues seraient ainsi aussi utiles à cela. Les statues apparaitraient comme des indices, des indices tonitruants, des indices de tonnerre pour donner à voir les sentiments entre la terre et le ciel.
Les statues apparaissent aussi presque toujours comme des tas. Les statues apparaissent à la fois comme des tas de pierres et des tas d’instants. Les statues apparaissent comme des tas de pierres d’instants. Les statues donnent presque toujours l’impression de s’entasser à l‘intérieur d’elles-mêmes. Les statues donnent presque toujours l’impression et aussi l’empreinte de s’entasser à l’intérieur d’elles-mêmes. La statue étreint son tas. La statue étreint son empreinte. La statue retreint le tas de son empreinte comme l’empreinte de son tas. La statue se tient là où elle étreint le tas de son empreinte comme l’empreinte de son tas.
La statue se tient là où elle se trouve. La statue se tient là où elle trouve sa perte. La statue se tient là comme l’atlas de son archéologie même. La statue se tient là comme l’atlas de ses propres empreintes digitales, comme l’atlas des empreintes digitales par lesquelles elle se cherche et se trouve à l’intérieur de la terre, par lesquelles elle essaie de s’extraire de la terre. La statue porte ainsi ses doigts sur ses épaules. La statue porte ainsi ses empreintes digitales sur son dos. La statue porte le jaillissement de ses doigts sur ses épaules. La statue porte le geyser de ses empreintes digitales sur son dos.
Selma Lagerlöf à Karlstad en Suède,
Il me semble que l’aspect le plus intéressant de cette statue c’est d’abord sa stature pliée. Selma Lagerlöf semble en effet assise à l’intérieur du fauteuil pliant de son propre corps. Il en résulte une sorte de nonchalance austère, une sorte d’oisiveté solennelle, une sorte d’oisiveté ascétique, oisiveté ascétique que souligne aussi l’entrecroisement des mains et des doigts sur ses genoux. Selma Lagerlöf semble ainsi à la fois détendue et astreinte, et même détendue à l’intérieur de son astreinte, ce qui révèle alors une allure très proche des héroïnes de Dreyer. Et le miracle alors c’est qu’elle semble ressusciter sous la forme ou plutôt sur la forme d’un tombeau, qu’elle semble ressusciter sur la forme d’une pierre tombale, sur la forme d’une pierre tombale aux doigts croisés, sur la forme d’une pierre tombale qui fait du tricot, d’une pierre tombale qui tricote l’invisible, d’une pierre tombale qui tricote les yeux même de l’invisible.
Les statues semblent muettes autrement dit saturées de voix, saturées de voix fantômes, saturées de voix morts vivantes ou encore de voix mort-nées. Les statues semblent muettes autrement dit hantées de voix impossibles. Raoul Ruiz a écrit un texte bizarre à propos de cette relation entre les statues et les voix, entre les statues et les voix fantômes : une pièce de théâtre intitulée Le Convive de Pierre. Ruiz y fait dialoguer des voix de femmes enfermées à l’intérieur d’une statue de Don Juan, comme si Don Juan était devenu sa propre statue du Commandeur et que cette statue du Commandeur-Don Juan était enceinte d’innombrables voix de femmes. (Elias Canetti a aussi inventé à propos de Karl Kraus si je me souviens bien la curieuse notion de masque acoustique. Les statues seraient ainsi aussi qui sait recouvertes de masques acoustiques. Et à propos du masque et du son, Charles Dantzig remarque quant à lui à l’inverse ceci. « Un masque n’a pas d’oreilles. »)
ou comme voici Gertrude Stein écoute les hoquets de son chien Basket laper l’eau
A propos du hoquet, du hoquet de l’âme et aussi surtout du bégaiement, il y a évidemment l’œuvre de Gerashim Luca, Je ne sais si tu l’as lue.
La poésie est un "silensophone", le poème, un lieu d'opération, le mot y est soumis à une série de mutations "sonores, chacune de ses facettes libère la multiplicité des sens dont elles sont chargées. Je parcours aujourd'hui une étendue où le vacarme et le silence s'entrechoquent - centre choc -, où le poème prend la forme de l'onde qui l'a mis en marche. Mieux, le poème s'éclipse devant ses conséquences. En d'autres termes : je m'oralise. »
Tous les matins l’eau dans l’eau a bien réappris à jouer
Oui en effet l’eau joue. L’eau joue à tomber avec aisance. L’eau joue à défier paradoxalement la lumière. L’eau joue à défier la lumière par le geste de tomber. L’eau joue à défier l’arrogance de la lumière, l’espoir arrogant de la lumière par le geste de tomber, par le geste de tomber par aisance du désespoir, par le geste de tomber comme matière d’aisance du désespoir. L’eau va toujours plus bas, dit Ponge. L’eau apparait à chaque instant à la recherche du zéro, à la recherche de la paix du zéro, à la recherche de l’allongement du zéro, à la recherche de la paix allongée du zéro. L’eau allonge le zéro avec joie. L’eau allonge le zéro avec joie et transforme ainsi le zéro en ellipse, en ellipse de la paix, en ellipse du désespoir, en ellipse de paix du désespoir. L’eau joue ainsi chaque matin à allonger le zéro qu’elle élude comme à éluder le zéro qu’elle allonge. L’eau joue ainsi chaque matin à allonger à l’intérieur de la terre le zéro qu’elle élude à l’intérieur du ciel.
Encore l'océan Wolo fait tanguer de tout bâbord tribord au nord et au sud les ancres sagaces de sa générosité.
Michel Leiris a bien vu qu’il n’y avait qu’une lettre de différence entre langage et tangage. Langage tangage ou ce que les mots me disent. A propos du tangage il y a aussi le poème Brise Marine de Mallarmé.
« Une ivresse belle m’engage
Sans craindre même son tangage
De porter debout ce salut
Solitude, récif, étoile »
Dès lors utiliser ces notes sans nom, est-ce moi-même ou l'auteur, et l’auteur est-ce moi-même, j’oublie si vite ce qui me traverse la présence.
Toi-même tu sembles dire dans tes correspondances dans tes rebonds, la phrase n’appartient à personne personne n’est la phrase la phrase n’est personne elle est la phrase de personnes qui sont la phrase devant la phrase de personne.
Il y a un portail vers la phrase dans toute phrase qui arrive par la phrase, il y a une reconnaissance de la phrase de la phrase par la phrase de personne.
En effet je n’ai pas le sentiment que les phrases soient les phrases de quelqu’un, autrement dit d’une identité ou d’un sujet. J’ai malgré tout le sentiment que les phrases apparaissent comme les phrases de quelque chose. Quelque chose c’est à dire la chair, la chair comme chose précisément du destin, la chair comme jouet heureux du destin. Ainsi ce qui écrit des phrases, ce n’est pas quelqu’un, un moi, un homme ou un monsieur. Ce qui écrit des phrases c’est plutôt une chair inhumaine, la chose inhumaine d’une chair, la chose inhumaine d’une chair qui essaie d’adresser sa forme au destin, la forme précise de son futur au destin c’est-à-dire à la couleur du oui, à la démesure de couleur du oui. C’est pourquoi le à oui n’est pas un ton ou une tonalité. Le à oui apparait plutôt comme un geste de la couleur, le geste de voix de la couleur, et qui sait comme le geste de couleur de la voix.
Je ne parviens pas à comprendre exactement ce que tu veux dire avec la fable de Paulhan qui s’endort dans un champ pendant la course. En effet je n’ai pas l’impression que celui qui jouait à dormir pendant la course c’était Paulhan, j‘ai plutôt le sentiment que c’était Malcolm de Chazal. Et cela simplement parce que pour Chazal il n’y avait pas de course, je veux dire pas de course afin de vaincre d’autres compétiteurs, Chazal savait en effet qu’il était seul en course et que cette course c’était ainsi précisément celle de son sommeil. Ecrire pour Chazal c’était comme une manière de dormir plus vite que son ombre, une manière de dormir à la fois plus lentement et plus vite que la nuit même. Disons peut-être que l’audace de Paulhan a été de dormir pendant qu’il lisait Sens Plastique suivant alors un principe de Raoul Ruiz selon lequel il est aussi important de savoir dormir à l’intérieur des œuvres d’art.
Il y a à l’intérieur de la correspondance entre Chazal et Paulhan des trucs prodigieux. L’incroyable candeur de la mégalomanie de Malcolm de Chazal y apparait presque à chaque phrase. Ceci par exemple « C’est parce que mon livre est bête et simple qu’il est beau. La véritable intelligence est très peu intelligente. Plus les hautes formes de l’esprit sont mises à la portée de tous, plus le scripteur qui les traduit est génial. Je n’en veux pour exemple que le message de simplicité du Christ, si génialement à la portée de tous. »
Il faut porter une chaise sans jamais s’assoir dessus au sommet d’une montagne sans nom.
Et parfois aussi à l’inverse pour s’amuser, porter une montagne en s’asseyant à chaque instant dessus. Porter une montagne en s’asseyant à chaque instant dessus au sommet d’une chaise posée à l’intérieur du vide entre son prénom et son nom. Et parfois aussi pour s’amuser jongler avec une montagne les mains dans les poches comme une otarie, jongler avec une montagne les mains dans les poches sous les yeux comme une otarie. Jongler ainsi avec une montagne au sommet de son museau, au sommet du museau de son amusement comme une otarie afin de poser ensuite cette montagne sur une chaise tranquillement inscrite à l’intérieur du vide entre son prénom et son nom.
Comme dans le film lettriste de Maurice Lemaître de 1951 « le film est déjà commencé », il se produit dans cette chanson (chanson sur un ostinato chanson modale) certains courts circuits qui font le caractère, si l’on poursuit la référence aux lettristes, de ce qu’on pourrait appeler une chanson "discrépante".
J’ai évoqué ce problème de l’électricité de la lettre, de l’électrocution de la lettre à l’intérieur de la correspondance avec P. Jaffeux. J’avais par exemple entre autre écrit ceci.
« Il dessinait le silence avec des lettres afin de voir sa voix. »
J’aime beaucoup la simplicité intense de cette phrase. Grande phrase simple, quasi schématique. Phrase de vieux calligraphe sage, phrase semblable aux papiers découpés de Matisse à la fin de son existence. Phrase ultra exacte, phrase de tao ultra exacte. Il y a une prodigieuse décantation de temps à l’intérieur de cette phrase, une prodigieuse densité aérienne de temps, phrase où la densité même du temps danse, phrase où la densité même du temps danse à l’intérieur de la translucidité de l’air.
« Il fut délivré par le vide dès que les lettres conquirent une image silencieuse de sa voix. »
Les lettres révèleraient l’image taciturne de la voix, taciturne c’est-à-dire qui tourne en silence. Les lettres révèleraient les différentes manières de tourner en silence de la voix. Chaque lettre donnerait à sentir les gestes de danse de la voix, les postures de danse de la voix, les manières de danser de la voix, les gestes de danse tourbillonnante et torsadée de la voix. Les lettres dessinent la délivrance du vide, la délivrance du vide à l’intérieur de la voix. Les lettres révèlent les dessins de délivrance du vide à l’intérieur de la voix. Les lettres dansent les dessins de délivrance du vide à l’intérieur de la voix. Les lettres révèlent les différentes manières de disparaitre du corps à l’intérieur de la voix, les différentes manières de disparaitre du corps comme danse de la voix, comme danse d’éclipse de la voix, comme danse de vertige de la voix.
« le squelette du vide »
Les lettres révèlent le squelette du vide. Les lettres essaiment le squelette du vide. Les lettres essaiment les tournures de squelette du vide. Les lettres essaiment les hypothèses de squelette du vide. Les lettres dessinent les hypothèses de squelette du vide. Les lettres hasardent les hypothèses de squelette du vide. Les lettres dansent les hypothèses de squelette du vide. Les lettres dessinent les hypothèses de squelette du vide comme danse taciturne de la voix. Les lettres dansent les hypothèses de squelette du vide comme dessins taciturnes de la voix.
« Sa pensée se rapprochait du vide s’il priait pour remplir la distance entre sa voix et l’écriture. »
C’est comme si pour vous le vide était la mutation d’espace comme la réversibilité de temps entre la voix et l’écriture. Et la seule manière d’inventer un contact entre la voix et l’écriture c’est de saturer le vide, de saturer les tournures du vide. Ces tournures saturées du vide seraient peut-être semblables à celle du vent. Le vent ce serait la clameur du vide, la tournure saturée du vide comme clameur. (Même si cette clameur du vide est aussi pour vous semblable au murmure du silence « Il entendit le murmure du silence lorsqu’il baissa la voix pour écouter la clameur du vide. »)
« Les lettres sont séparées par le vide afin que le silence imprime un mouvement à l’alphabet. »
Ce qui relierait votre vision de l’alphabet à la pensée orientale (au tao par exemple) ce serait peut-être la formule imprimer un mouvement. Pour vous imprimer ce n’est pas fixer les lettres ; c’est à l’inverse le mouvement des lettres qui imprime des images, qui imprime des images du vide entre terre et ciel. Pour vous la lettre n’est pas fixité, la lettre est mouvement. Ce qui est fixe, ce n’est pas la lettre, c’est le mot. Le mot fixe le mouvement des lettres. Le mot fixe le mouvement aléatoire des lettres. Le mot fixe le mouvement atomique et moléculaire des lettres. Il y a peut-être ainsi aussi dans votre écriture un aspect présocratique, disons quelque chose de démocritéen. « Il existe un grand vide dynamique dans lequel il y a un nombre illimité de lignes de force qui s’appellent atomes. » note H. Wismann à propos de Démocrite. Pour vous, il y a un grand vide dynamique dans lequel les lignes de force des nombres s’appellent lettres.
(…)
Il y a une puissance du et, une intensité du et à l’intérieur de l’alphabet. L’alphabet serait ce qui affirme chaque lettre comme forme du et, comme posture du et, comme tournure du et. L’alphabet révélerait les circonvolutions du et, les voltes du et, les volutes du et, les courts-circuits du et, les courts-circuits voltaïques du et. Je parle ici du Et tel que le pense Deleuze. « Substituer le Et au Est. (…) Le Et comme extra-être, inter-être (…). Penser avec Et, au lieu de penser Est, de penser pour Est. » (Dialogues). L’alphabet révélerait l’affect du et, l’affect de bienveillance comme de bestialité du et. L’alphabet révèlerait l’affect d’absurdité du et, l’affect de bienveillance absurde, l’affect de bestialité absurde du et, l’affect d’aberration du et, l’affect de bienveillance aberrante, de bestialité aberrante du et. L’alphabet révèlerait l’affect de hasard du et, l’affect de hasard aberrant, l’affect de hasard absurde du et.
« Il y a une sobriété, une pauvreté, une ascèse fondamentale du et. » Deleuze. L’alphabet révèlerait ainsi l’affect de hasard ascétique, l’affect d’ascèse aléatoire du et. L’alphabet indiquerait que le hasard comme le et ont des sentiments et que les sentiments du hasard comme du et s’entrelacent précisément à l’intérieur des lettres, s’entrelacent précisément par les lettres.
L’alphabet révèlerait le feu du et, la flambée du et, le flamboiement du et, l’affect flamboyant du et, l’affect de hasard flamboyant du et. « Et …et …et, le bégaiement. » Deleuze. L’alphabet révèlerait le bégaiement du et, le flamboiement de bégaiement du et, l’affect de bégaiement du et, l’affect de bégaiement flamboyant du et, le hasard de bégaiement du et, le hasard de bégaiement flamboyant du et, l’affect de hasard bégayé, flamboyant bégayé du et, la bêtise du et, le hasard de bêtise du et, le flamboiement de bêtise du et, le flamboiement de bêtise bégayée du et, la béance du et, l’affect de béance du et, le hasard de béance du et, le hasard de béance bégayée, flamboyante bégayée du et.
« Le feu précède les hommes puisque l’invention du rire devança celle de l’alphabet. » Ainsi de même c’est comme si l’alphabet de l’électricité révélait la forme d’un rire du feu, la forme d’un rire du feu antérieur à la préhistoire elle-même. « exister consiste à être foudroyé par des lettres et des nombres qui révèlent l’antériorité d’un alphabet électrique sur une écriture préhistorique. » L’alphabet de l’électricité révélerait le rire de feu du vide, le rire de feu du vide antérieur aux hommes, antérieur aux différentes espèces animales et antérieur à la matière même du monde, rire de feu du vide qui précisément provoquerait l’apparition de la matière par ses métamorphoses mêmes.
« L’objectif de l’alphabet est d’apparaitre impressionné par l’image d’une émotion magique. »
Ce que vous cherchez à atteindre ce serait l’influence incessante d’une émotion magique, une manière d’imaginer à la fois l’alphabet par la magie de l’électricité comme une manière d’imaginer le devenir humain par le mouvement de danse des nombres et des lettres. Ce que vous désirez ce serait que le mouvement de danse des nombres et des lettres s’imprime sur le corps de l’homme pour transmuter ainsi l’être humain en devenir humain de et, en devenir humain comme mouvement féerique de et. Il y a une grande puissance de féerie dans votre écriture. L’alphabet de l’électricité est une force féerique. L’alphabet de l’électricité est une manière de féeriser le devenir humain de et.
(…)
Un matin à l’instant de l’éveil, j’ai soudain entendu ceci. Elettricité.
Je n’ai pas eu l’impression que c’était un mot, un mot pensé à l’intérieur de la tête, j’ai plutôt eu le sentiment que c’était une torsade de lettres (ou encore un thyrse de lettres), une torsade de lettres autour de la tête.
L’électricité révèlerait une élection de lettres. L’électricité parviendrait ainsi à citer et aussi à relier des lettres élues, des lettres élues plutôt que lues c’est à dire qui sait des lettres éludées par leur lecture même.
L’enjeu de votre écriture serait ainsi aussi de respirer l’électricité, de respirer le rythme même de l’électricité. Et ce qui parviendrait à respirer le rythme de l’électricité ce serait le rire du vide, le rire de hasard du vide.
« Il n’y a pas de gloire plus entière, plus émouvante qu’une gloire sportive ! »
Ah quelle phrase superbe. Pourrais-tu me dire malgré tout qui en est l’auteur ? Le journaliste sportif Christian Montaignac a écrit de très nombreux articles à propos de la gloire sportive. Ceci par exemple à propos de Nadia Comaneci.
Nadia Comaneci, Génie d’une Fillette.
L’histoire appartient aux enfants qui s’ennuient et espèrent autre chose. C’était écrit, elle le portait dans ses yeux mais nul ne se doutait de ce qui allait jaillir de cette lointaine mélancolie, de ce corps en action dont le souvenir s’éclaire encore aujourd’hui.
…
C’est alors que le son de la salle changea, comme si tout devait être suspendu, le temps, les regards, la respiration. Et l’amorce d’une admiration. Silence, le génie était au travail. Nadia Comaneci, c’était elle, faisait la lumière. Soudain, il y eut, pour tant de témoins, de vulgaires terriens, une sensation d’irréel. La gloire du recueillement l’attendit en bas, sur le tapis, pieds joints, bras étendus, et l’immense clameur suivit.
…
L’ange avait un visage où nulle trace sensible n’était relevée. Devait-il être noté ? Des hommes et des femmes s’y employèrent qui imaginèrent la perfection mais le système électronique, vaincu par l’irruption du merveilleux, comme par désenchantement devant l’immatériel, afficha 1,00. Il n’avait pas prévu le 10,00 cette note à quatre chiffres qui venait d’être accordé à la divine gamine.
…
Légère comme un flocon, précise comme une mouette, la toute fraîche diva hissa à un sommet inhabité l’art de l’enfance.
…
Elle proposa au passage, en un saut périlleux latéral, le jamais vu sans le moindre frisson, de l’autre côté d’un miroir où, qui sait, l’immortalité l’attendait. « La » Comaneci était née, ses soupirants exultaient et le monde n’était plus qu’un opéra chaviré. Elle illuminait les regards, mais le sien se perdait dans la profondeur des nuits.
Dans « Espèces d’espaces » Georges Perec, comme toujours parle d’écriture, de l'exercice :
« Continuer
Jusqu'à ce que le lieu devienne improbable
jusqu'à ressentir, pendant un très bref instant, l'impression d'être dans une ville étrangère, ou, mieux encore, jusqu'à ne plus comprendre ce qui se passe ou ce qui ne se passe pas, que le lieu tout entier devienne étranger, que l'on ne sache même plus que ça s'appelle une ville, une rue, des immeubles, des trottoirs… »
Je me souviens vous avoir parlé de ce livre de Perec à Jean-Daniel et à toi et cela presque aux premiers instants de notre première rencontre. J’avais alors évoqué cet extrait. Je le cite ainsi pour mémoire.
« J’ai plusieurs fois essayé de penser à un appartement dans lequel il y aurait une pièce inutile, absolument et délibérément inutile. Ça n’aurait pas été un débarras, ça n’aurait pas été une chambre supplémentaire ni un couloir, ni un cagibi, ni un recoin. Ç’aurait été un espace sans fonction. Ça n’aurait servi à rien, ça n’aurait renvoyé à rien.
Il m’a été impossible, en dépit de mes efforts, de suivre cette pensée, cette image, jusqu’au bout. Le langage lui-même, me semble-t-il, s’est avéré inapte à décrire ce rien, ce vide (…). »
J’ai l’intention de relire ce livre de Perec. Nous en reparlerons ainsi un jour ou l’autre.
A Bientôt Boris
un mot qui se dit petit, un poisson, une montagne
Bonjour Boris,
j’ai commencé quelques réponses pour toi, à peine papier, beaucoup en tête, en tête de papier et en papier de tête, mais comme je l’ai écrit déjà : « d’un jour à l’autre il y a des choses qu’on ne peut plus dire ».
Que je le croirais alors même qu’aucun mot n’est périssable pourvu qu’il soit bien balancé, ici là (« ichi leu » tel le poète picard) la plus petite loupiote fait reluire une mosaïque d’interjections.
Ici lu, sous la bannière de Gertrude Stein, on parle de « petit peuple des mots ». Et cela même dans l’esprit chéri de conversation car « Le bavardage à bâtons rompus et son laisser-aller si dédaigné sont justement le côté infiniment sérieux de la langue.»
Ici Novalis, et cette citation glanée à "la Cité de parole" chez Stéphane Bouquet.
Je voulais simplement dire combien il m’est joyeux de te savoir en route pour chez nous dans la terminaison d’octobre. Pour te voir et pouvoir enfin peut-être réussir à t’écrire, car l’humain pousse à ça.
Délicat oui, être tout à fait hors de la pièce.
Il me semble que j’ai besoin de retrouver à l’oral la conversation, comme dans l’esprit du lieu sa sensation, pour pouvoir enfin jouer la musique sur le papier, celle pour laquelle tu te fais émetteur.
Il y a un sentiment fraternel de la conversation et même une sensation d’invincibilité de la conversation et malgré que cela puisse être tout le contraire, il semblerait, dès lors que la conversation est engagée avec fraternité (en lien probable de cette « cache de douceur au fond du langage » dont cause le bouquin de Bouquet autour des poètes américains) que rien ne puisse l’arrêter. 'Le jardin ouvrier' d’Ivar Ch’vavar en sait quelque chose c’est certain. Rien n’arrête le sentiment d’invincibilité de la conversation.
Dans cet esprit démocratique de partage de la phrase, je reprends un extrait de ta dernière lettre qui apparait manifeste de ce qui agit après toi :
« En effet je n’ai pas le sentiment que les phrases soient les phrases de quelqu’un, autrement dit d’une identité ou d’un sujet. J’ai malgré tout le sentiment que les phrases apparaissent comme les phrases de quelque chose. Quelque chose c’est à dire la chair, la chair comme chose précisément du destin, la chair comme jouet heureux du destin. Ainsi ce qui écrit des phrases, ce n’est pas quelqu’un, un moi, un homme ou un monsieur. Ce qui écrit des phrases c’est plutôt une chair inhumaine, la chose inhumaine d’une chair, la chose inhumaine d’une chair qui essaie d’adresser sa forme au destin, la forme précise de son futur au destin c’est-à-dire à la couleur du oui, à la démesure de couleur du oui. C’est pourquoi le à oui n’est pas un ton ou une tonalité. Le à oui apparait plutôt comme un geste de la couleur, le geste de voix de la couleur, et qui sait comme le geste de couleur de la voix. »
D’une façon un peu étrange, dans un réel d’allure allégorique, « la chair comme jouet heureux du destin » m’est apparue l’autre jour dans un documentaire sur les fonds marins.
J’avais cru halluciner ces admirables poissons, extravagance de la chair nourrie de tant de couleurs, poissons tout semblables à des têtes flottantes à la surface du globe : ainsi coiffes d’évêques, drapés haute couture, têtes d’aquarium.
(« Un poisson qui a un cerveau-aquarium ! l'eau envoie son cerveau dans une bouteille à la mer. Le cerveau visuel est un appât pour attraper les pensées d'autres espèces. J'en pleure pour être tracté par transparence comme une ampoule. » J.D. Botta) .
J'ai ressenti comme un apaisement. Réaliser que nous en savons si peu sur l’univers mais que nous pouvons tout de même admirer les extraterrestres. On pouvait mourir tranquille.
Ils étaient là, c’était là, de toute éternité, à se voir sans limites le grand vivant comme un rêve de la fleur chazalienne (« Toute fleur est comme la Joconde, dont le regard, d’où que nous le fixons partout nous suit »), et partant, dans ces gestes inouïs de la couleur, dans ce carnaval dérobé, pouvoir se figurer le destin de l’écriture, à travers le flow continu de tous les hommes, dans une accueillante démesure.
Le grand vivant est comme la Joconde dont le regard partout nous suit.
« Je ne puis pas le comprendre, ni même le croire. je ne vis que de-ci de-là à l’intérieur d’un petit mot dans l’inflexion duquel (le ö de stösst) je perds pour un instant ma tête inutile. La première et la dernière lettre sont le commencement et la fin de ma manière de sentir qui s’apparente à celle du poisson. » Kafka, Journal
(figure que Simon Leibovitz me fait suivre à l’instant)
Un ami aussi m’envoie une page de 'l’Ombilic des Limbes', Antonin Artaud
« Le ventre évoque la chirurgie et la Morgue, le chantier, la place publique et la table d’opération. Le corps du ventre semble fait de granit, ou de marbre, ou de plâtre, mais d’un plâtre durcifié. Il y a une case pour une montagne. L’écume du ciel fait à la montagne un cerne translucide et frais. L'air autour de la montagne est sonore, pieux, légendaire, interdit. L’accès de la montagne est interdit. La montagne a bien sa place dans l’âme. Elle est l’horizon d’un quelque chose qui recule sans cesse. Elle donne la sensation de l’horizon éternel. »
Je survole le paysage je lui réponds,
« L'horizon éternel » sa répétition infinie. Oui. Je pense à Gertrude Stein, il me semble aussi, elle « la Sisyphe joyeusement entêtée qui roule à chaque instant la pierre de son nom au sommet du vide » (dans la voix de Boris Wolowiec). (soit, Montagne = sommet du vide immédiat ! cher Boris ) Et dans le circuit de la chose en pensant à Laurent Albarracin : de la chose à la chose, de la montagne à la montagne = > La montagne est pleine de montagne.
La montagne qu'on a au ventre est aussi une table d'opération. Les montagnes font des opérations dans le ventre du ciel. Dans le ventre de la place publique. Dans le ventre de la place publique le ciel tombe. Le ciel tombe sur la montagne comme il tombe dans le ciel, ce ciel qui tombe. Elles aussi les montagnes, les montagnes tombent. Les montagnes tombent du ciel, dans le ciel. Ça fait alors des cases et des tableaux. Des tableaux raturés de ciels et de montagnes. Des montagnes d’opérations. Et ce « cerne translucide » que l'écume fait à la montagne c'est très beau. Quand j'y pense j'ai un ami, Sing Sing, il dit comme ça « le gras du ciel ».
Boris si tu me permets je vais faire un empilement de planchers de vaches, un tas d’images, pour ne pas oublier tout ce que tu éclaires, (comme le cousin Willie envoie un projecteur sur Rose assise sur sa chaise au sommet de la montagne quand « Le monde est rond ») et grimper au sommet du vide :
Après Fellini la chansonnette ultime (oh la la), les citrons de Kandinsky, Georges Braque et le don du chant chez les peintres, les statues semi-cul de jatte, les montagnes russes, le monde gigogne et le circuit de la chose (Albarracin…), le ciel dans le lac comme toit du zéro, le lac du zéro, les grandes orgues entre le lac et le ciel du zéro, « il y a toujours de la place derrière une chute d’eau quand elle monte haut » (Gertude Stein), l’eau dans l’orgue, les sentiments entre le ciel et la terre, tas de la statue, atlas de la statue (!), hé ‘l’oisiveté’ de Selma Lagerlöf assise dans sa statue de Karlstad, les voix impossibles des statues, les yeux d’invisible des statues, les poupées noires, la reformulation, l’eau des statues, le tombeau des statues, la dodine le rocking chair d’Aimé Césaire, le langage tangage, l’âge d’homme, la ville des pirates de Raoul Ruiz, concordance au début de « ce jour là » le chant des fous à bicyclette comme un yodel liquéfié dans la brume en territoire helvête Elsa Zylberstein vierge Marie de pierre chante un ave de n’importe quoi ; dormir dans l’oeuvre comme Jean Paulhan avec le livre de Malcolm de Chazal à moins que ce ne soit l’auteur lui-même qui s'est endormi ? ah oui !
l’humain dors dans l’humain fait des émules dans le sommeil de l’humain, fait des émules dans le dormeur.
dormir sans avoir peur de la répétition, sans désespoir galopant de toutes ses paires de jambes, Paralipomène, Sisyphe géomètre : Gherasim Luca et comment la pensée vient dans le mot « celui qui ouvre le mot ouvre la matière », comment voir sa voix, comment représenter le silence (‘le silensophone’), décantation/cantation/cantate de voix, rebours et instantané de la pensée, ressac poétique, bégaiement chéri, identité flexe, à oui geste de la couleur, gestes de la voix, voix de la couleur, spectre des couleurs, cubomanie, électrocution, la question du hasard, le vertige, masques sans oreilles, masques de laine de Marie Rose Lortet et paysages statufiés de dentelle amidonnée, son fil d’Ariane vient piquer les contours du vide immédiat.
Alors il me vient, partager une chanson de notre « Practice chanter » c’est le prochain album.
mais encore la Stein !
« Rose s’arrondissait quand elle pensait ses yeux sa tête sa bouche ses mains, elle s’arrondissait de partout quand elle pensait et pour se soulager d’entendre sa pensée elle chantait.
Elle chantait une chanson de la montagne. »
ROULER SA TÊTE LA MONTAGNE
Un cri de joie m'a ouvert le lait fraise de la bouche.
(Jean-Daniel Botta)
...
La mémoire de rouler sa tête interroge de joie ce qu’elle a toujours été cependant.
La mémoire de joie interroge rouler sa tête qui demeure ce qu’elle a toujours été cependant.
Qui questionne de joie?
C’est rouler sa tête qui questionne qui questionne rouler sa tête.
Qui interroge? C’est rouler sa tête ou plutôt c’est la mémoire de rouler sa tête qui prépare la question de joie qui demeure qui demeurée et qui demeure.
Qui de joie qui de rouler sa tête.
(Léonore Boulanger)
…
Derrière chez moi il y a la montagne
Moi mon ami nous la montons souvent
À la montée il y a beaucoup de peine
En descendant mille soulagements
Derrière chez nous le rossignol y chante
Soir et matin dès la pointe du jour
Et il nous dit dans son joli langage
Les amoureux sont toujours malheureux
Le mal d’amour est une maladie
Le médecin ne sait pas la guérir
Si la montagne elle était coupée rase
J’en planterais une immédiatement
(traditionnel Béarn & Bigorre)
...
Venez bien vite venez bien vite venez bien vite
Venez bien vite venez bien vite venez bien vite
(en ouvrant : ‘Papiers de nouveau venu et continuation du rien’ de Macedonio Fernandez)
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C’est comme on le rapporte !!
…
Je n’arrive pas à aller partout, mais sans doute je reviens. Et bientôt on se voit !
Léonore
Et puis
partant d’Edgar Poe, de Li Po le poète chinois, d’Oulipo, de ‘la classe sous terre’ chapitre de ‘la boite aux lettres du cimetière’ de Serge Pey.
Et finalement sans trop de préméditation hommage rendu aux merveilleuxmerveilleux ‘Gedichtgedichte’ d’Oskar Pastior (extrait ici) :
aah mais où commence le poème-trou il ne commence pas mais aah en
quoi consiste-t-il il ne consiste pas mais aah quel est son essence
l’essence du poème trou est très simple et avec quoi est-il
accommodé eh bien dans un sens élargi de poésie
J’ajoute ainsi le mien Gedichtgedichte, autre chanson figurant le « Practice chanter »
soit sa posture le poème,
POÈME POÈME TELTRUC SA PUISSANCE
un poème po
un poème creux
un poème peut
un poème creusé
un poème pue un poème
un poème crevé
comme un vieux pneu
un poème poème
un poème peu aiment
un poème preuve
un poème creusé d'été
un poème crevé d'étoiles
le creux du poème creusé
la peau l'avait essayé pourtant
mais sans une preuve une petite mort
un vieux pneu serait plus émouvant
TELTRUC SA PUISSANCE
Sa prière m’a décoloré pour les trois phrases que j’en dis teltruc
Ça faisait grand temps qu’elle m’aurait piégé puissante
et grand temps puissante
là maintenant il m’aurait poussé alors teltruc
Teltruc qui gravit au nord l’attraction de puissance
l’attraction qui gravit au nord de la puissance
dans les yeux de la prière
là teltruc
Teltruc la puissance
Une attraction
un beau catalogue
pour que nous arrivions à vivre teltruc
pousser teltruc
trouver tel jeu
pression de quoi
Ce truc tel qu’il déchire
À la fin
dans sa voile
dans ses fauves
dans sa voile
dans ses fauves
ce truc se joue de la difficulté
Grosse musique gros bouquin à relier
et que nous allons vivre
si que ceci nous dispense un temps de teltruc
si que ceci nous fait la paix
Ça remplie teltruc
ça vous le vide
ça remplie teltruc
ça vous le vide
La beauté