Marges de Mots de Philippe Jaffeux
« L’enfant qui dessine (…) nous enseigne à utiliser les formes et les intuitions plutôt que les idées ou la logique. »
Ce que l’enfant inscrit à l‘intérieur du blanc ce ne sont pas des pensées, ce ne sont pas des idées. Ce que l’enfant inscrit ainsi à l’intérieur du blanc ce sont plutôt des intuitions, des schémas, des schémas intuitifs, des schémas d’intuition. L’enfant inscrit à l’intérieur du blanc des schèmes d’apparition, des schèmes d’équilibre, des schémas d’apparition en équilibre, des schémas d’intuition en équilibre.
« Il n’existe pas de séparation entre l’image et l’écrit pour l’enfant magicien et iconoclaste ; celui-ci assimile naturellement ses pseudos textes à ses dessins et vice-versa. »
Pour l’enfant les lettres apparaissent toujours déjà comme des images et les images apparaissent toujours déjà comme des lettres. Pour l’enfant la lettre survient de manière iconologique et l’image survient de manière littérale. L’enfant utilise à chaque instant des images-lettres et des lettres-images à savoir des schémas. L’enfant schématise. L’enfant schématise ses sensations et ses sentiments. L’enfant schématise ses sensations et ses sentiments par le geste de jouer avec des images-lettres et des lettres-images.
« Comment éprouver le besoin d’écrire comme le petit enfant marche, sans savoir où il va, en se laissant porter par le souffle d’un temps insaisissable ? »
Ecrire comme l’enfant marche. Ecrire comme marcher à la surface du feu. Ecrire comme l’enfant marche à la surface du feu. Ecrire comme marcher avec le souffle. Ecrire comme marcher avec le souffle à la surface du feu. Ecrire comme l’enfant marche avec le souffle. Ecrire comme l’enfant marche avec le souffle à la surface du feu. Ecrire comme marcher avec la main du souffle. Ecrire comme l’enfant marche avec la main du souffle. Ecrire comme marcher avec la main du souffle à la surface du feu. Ecrire comme marcher avec la main immense du souffle. Ecrire comme l’enfant marche avec la main immense du souffle. Ecrire comme l’enfant marche avec la main immense du souffle à la surface du feu.
« A l’instar de l’enfant qui dessine j’écris en tâtonnant, en agençant des mots comme des formes. »
Ecrire comme tâtonner. Ecrire comme tâtonner à l’intérieur du feu. Ecrire comme tâtonner à l’extrémité du feu. Ecrire comme tâtonner à l’extrémité de la falaise du feu. Ecrire comme tâtonner à l’extrémité de la falaise de facilité du feu. Ecrire comme tâtonner à la manière d’un enfant aveugle. Ecrire à la manière d’un enfant aveugle à l’extrémité de la falaise du feu. Ecrire à la manière de l’enfant aveugle de l’extase. Ecrire à la manière de l’enfant aveugle de l’extase à l’extrémité de la falaise de facilité du feu. Ecrire à la manière de l’enfant aveugle de l’extase à l‘extrémité de la falaise d’aisance du feu.
« Alphabet est peut-être un long livre parce qu’il a été écrit avec l’abécédaire des enfants qui sont toujours captivés par ce qui est grand. »
L’enfant apparait fasciné par la grandeur. L’enfant apparait fasciné par le gigantesque. L’enfant apparait fasciné par les formes gigantesques, par les formes gigantesques de la civilisation. L’enfant apparait fasciné par le monumental, par les formes monumentales de la civilisation. (Le cinéaste Ridley Scott a gardé à l’intérieur de ses films cette fascination enfantine face aux formes gigantesques de la civilisation, face aux formes monumentales de la civilisation.)
« Les lettres-atomes »
Proposer ainsi une approche chimique du langage, à savoir les mots comme atomes, les mots comme molécules, les mots comme molécules de lettres et les phrases comme molécules de mots. Révéler ainsi les postures chimiques du langage par lesquelles les lettres à la fois coïncident et tournent les unes autour des autres pour composer des mots et aussi les postures chimiques du langage par lesquelles les mots coïncident et tournent les uns autour des autres pour composer des phrases.
« Les films, qui trouvent leur origine dans une attraction foraine, n’ont peut-être pas besoin d’être analysés ni expliqués. »
De même votre écriture révèle l’attraction foraine de l’alphabet. Votre écriture révèle la force foraine de l’alphabet, la gravitation foraine de l’alphabet. Vous savez en effet que chaque lettre dispose d’une force tournoyante aussi intense qu’une grand-roue ou un grand-huit.
« Une danse de sensations propre au cinéma. »
Le cinéma compose une danse de sensations. Le cinéma architecture une danse de sensations. Le cinéma compose la danse de sensations de l’ainsi. Le cinéma architecture la danse de sensation de l’ainsi. Le cinéma compose la danse de sensations de l’ainsi ça. Le cinéma architecture la danse de sensations de l’ainsi ça.
« Une écriture s’organise au moyen de plans-phrases et des mots-photogrammes. »
Ou encore chaque phrase apparait comme un plan composé de lettres, comme un plan composé de photogrammes de lettres. Ou encore chaque phrase apparait comme un plan de schèmes, un plan de schèmes sensoriels, un plan de sensations schématiques. Ou encore chaque mot apparait comme une photographie de lettres, une photographie de lettres amalgamées.
« Des mots ou des phrases (…) évoquent le hors-champ cinématographique de l’alphabet. »
« Les films m’entrainent à réaliser un montage de mots, arrachés à leur condition et à leurs définitions. »
Les phrases apparaissent comme des montages de mots. Les phrases apparaissent comme les montages de mots du feu. Les phrases apparaissent comme les montages de mots de l’inconnu. Les phrases apparaissent comme les montages de mots du feu inconnu. Les phrases apparaissent comme les montages de mots de l’immédiat. Les phrases apparaissent comme les montages de mots du feu immédiat, comme les montages de mots de l’immédiat inconnu, comme les montages de mots du feu immédiat inconnu.
« Le hors-champ d’un texte, révélé par le cinéma, arpente la représentation élastique d’un temps oublié. »
Le cinéma révèle le hors-champ du langage. Le cinéma donne à sentir le hors-champ du langage. Le cinéma caoutchoute le hors-champ du langage. Le cinéma donne à sentir le hors-champ du langage comme oubli même du temps. Le cinéma donne à sentir le hors-champ du langage comme caoutchouc d’oubli du temps, comme caoutchouc d’amnésie du temps. Le cinéma donne à sentir le hors-champ de paralysie du langage. Le cinéma donne à sentir le hors-champ de paralysie du langage comme caoutchouc d’amnésie du temps. Le cinéma donne à sentir le hors-champ de catatonie du langage. Le cinéma donne à sentir le hors-champ de catatonie du langage comme caoutchouc d’amnésie du temps.